Kurt Searvogel Tarzan
© Ian Dille
VTT

L'homme qui a parcouru 122 561 km à vélo en un an

7 vélos, 5 paires de chaussures, un divorce, un nouveau mariage et 320 km par jour en moyenne.
Écrit par Will Gray
Temps de lecture estimé : 6 minutesPublished on
Il lui a fallu 7 vélos, 5 paires de chaussures, un divorce, un mariage et une moyenne de 320 km par jour, mais Kurt Searvogel a enfin battu le record de Tommy Goodwin, vieux de 76 ans, pour la plus grande distance parcourue à vélo en un an.
Pourquoi t'être lancé dans cette aventure ?
C'était considéré comme un record imbattable, et comme j'aime bien les défis, je me devais de tenter de résoudre celui-ci. J'avais l'argent nécessaire, la capacité de le faire, et comme celle qui est désormais ma femme voulait bien m'aider au niveau de la logistique, je me suis lancé !
Pourquoi le record de Goodwin a-t-il tenu si longtemps ?
La distance (120 805 km) était tellement énorme ! Et puis, ça coûte très cher, j'avais compté un dollar par mile. En outre, on sous-estime le soutien logistique nécessaire.
Comment tu t'es préparé ?
J'ai fait des triathlons, des ultras-marathons et la Race Across America en 2012. En 2014, j'ai battu le record de cette course. Ça allait au niveau des jambes, alors j'ai fait un mois où je faisais 8 heures de vélo par jour, histoire de voir si mon fessier allait tenir le coup !
Comment choisissais-tu ton trajet quotidien ?
Je suivais la météo. On a commencé en Floride, puis en Arkansas, dans le Wisconsin pour l'été puis retour en Floride pour l'hiver. Je regardais la direction du vent et quand ce n'était pas malin d'aller vers un endroit, on trouvait une boucle pour éviter le vent.
T'es-tu dit à un moment que tu n'allais pas réussir ?
Oui. Alicia était stressée à un moment parce que je roulais sur des routes où j'avais de bonnes chances de me faire renverser. Alors j'ai fait demi-tour et je suis revenu à l'endroit d'où j'étais parti. Puis il y a un ouragan pendant 5 jours. J'avais prévu 4 ou 5 jours de battement et il ne m'en restait plus que 2, alors je me suis dit "oh, ça sent mauvais", mais en fait on a réussi.
Tu faisais plus de 320 km par jour. Comment est-ce possible ?
Il s'agit de conserver une bonne vitesse. Tu ne veux pas te cramer quand tu n'en as pas besoin, donc quand tu arrrives sur une colline, tu prends un gros braquet, histoire de ne pas faire tourner les jambes constamment. Il faut aussi varier les vitesses et les braquets, afin de donner à tes muscles différentes façons de travailler. Ils se fatiguent plus vite si tu fais toujours le même effort, il donc varier.
Un peu de repos après une journée sur la selle

Un peu de repos après une journée sur la selle

© Ian Dille

Et le côté mental ?
Cela parait simple, mais la clé est de se lever tous les matins et de monter sur le vélo. Il faut se dire "ok, si je monte sur le vélo et que je fais mes 14 heures à 25 km/h, j'aurais mes 320 pour la journée."
Y a-t-il eu un matin où tu n'en étais pas capable ?
Non, pas vraiment. Monter sur le vélo n'était pas compliqué. Parfois, quand les choses ne se passaient pas bien, je pensais à descendre mais je n'ai jamais pensé à ne pas commencer.
Tu as roulé à travers beaucoup d'endroits. Quels étaient les trois lieux les plus incroyables ?
Natchez Trace, dans le Mississippi. Une autoroute protégée avec une vitesse limite de 80 km/h. Très bel endroit. Door County, dans le Wisconsin, avec des routes sympathiques sur le Lac Michigan. Enfin, la côte Est de la Floride contient de superbes protions sur la A1A.
Et la chose la plus déplaisante ?
La pluie. Je suis un cycliste qui n'aime pas la pluie, pour être honnête. Et aussi, le fait d'être renversé était la plus grande crainte d'Alicia. Elle me faisait porter des vestes fluorescentes et a peint mon casque en orange !
La famille et les amis de Kurt Searvogel

La famille et les amis de Kurt

© Ian Dille

Y a-t-il eu une journée où tu n'as pas roulé ?
Non. J'ai eu 5 accidents mais j'ai continué à rouler. J'ai souffert de fibrillation auriculaire quelques fois mais un cardiologue m'a autorisé à continuer. Et même quand je me suis marié avec Alicia, j'ai quand même trouvé le temps de faire 280 km ! Le jour où j'ai fait le moins de distance était celui où j'ai attrapé un virus et suis allé à l'hôpital.
Tu as utilisé combien de vélos ?
Sept. Des vélos de route, de trial et un vélo couché. Deux cadres sont désormais à la poubelle et deux autres n'ont plus aucun composants dessus !
Pourquoi le vélo couché ?
Sur la RAAM 2012, j'ai perdu l'usage de deux doigts à chaque main et il m'a fallu un mois pour m'en remettre. Avec le vélo couché, je pouvais changer de position pour éviter ça. Bon, une bonne couche de crème DZNuts m'a aussi aidé à tenir sur la selle et sauver mon fessier !
Tu as eu beaucoup de crevaisons ?
Oui, beaucoup trop ! En Floride c'était au moins une fois par jour. J'ai fini par prendre des pneus tout-terrain. Ils baissaient ma vitesse mais me permettaient de ne pas crever aussi souvent.
Kurt Searvogel Tarzan

Kurt Searvogel Tarzan

© Ian Dille

Qu'est-ce que tu mangeais ?
Des oeufs ou des flocons d'avoine pour un premier petit-déjeuner puis après deux heures j'en prenais un autre. Puis un premier et un second déjeuner. Je mangeais toutes les deux ou trois heures et buvait des boissons énergiseantes sur le vélo. Et à la fin de la journée, je m'offrais une pizza et trois ou quatre bières. Je suis un grand fan de bière, c'est mon carburant principal !
Comment le record a-t-il été validé ?
Je portais un moniteur cardiaque pour l'identification et on avait un suivi par Garmin ainsi qu'un tracker SPOT pour vérifier les données.
Et tu t'es senti comment quand tu as fini ?
Épuisé ! Alicia voulait un chiffre exact alors j'ai été obligé de carburer le dernier jour. Mais de retour à l'hôtel, on a vérifié le kilométrage et il m'en manquait un peu. Du coup je suis remonté sur le vélo pour faire exactement le nombre qu'elle voulait !
Et maintenant ?
Les longues distances, c'est fini pour l'instant ! Mais Alicia va s'attaquer au record féminin en avril !