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« Pour être honnête, je redoutais un peu cette manche. » explique d’emblée Loïc Bruni. « Cette piste est pour moi la plus dure de l’année et je suis arrivé en Italie avec des aprioris ». Traces ultra creusées, terrain instable : la redoutée « Black Snake » de Val di Sole a une réputation de piste exigeante, physique, technique et ultra engagée.
Loïc avait pourtant tenté de l’aborder avec sagesse : « Je suis arrivé là-bas avec un max de fraicheur et j’ai trouvé des lignes sympas au fil du weekend. La vitesse était bonne mais, quand il fallait faire un run entier, je n’arrivais pas à mettre tout bout à bout. Je faisais n’importe quoi. On dirait que je n’avais jamais fait de vélo de ma vie ».
Super Bruni dans le (super) dur
Avec le maillot de leader de la Coupe du Monde 2023 sur les épaules, Loïc a tenté de se ressaisir tout au long du week-end : « Honnêtement, je n’allais pas si mal dimanche matin malgré ma manche de qualification ratée. Je fais 16e avec énormément d’erreurs donc je savais que j’avais une belle marge de progression. J’ai changé quelques lignes, j’ai pris confiance pour la demi-finale mais je pars un peu vite et je tombe après une minute de course ! Je me suis mis un gros stop en heurtant un matelas, j’étais un peu découragé même si je me suis dit que ce n’est pas grave, que j’ai encore une chance pour la finale ». Résultat ? Il prend la 54e position.
Un peu de « lutte contre le désespoir » pour reprendre ses termes et Super Bruni repart de plus belle : « Mon staff a compris que ce n’était pas un jour facile alors on s’est mis d’accord sur le fait qu’aller chercher un podium, ce serait déjà très bien ».
Place à la finale. Est-ce que le déclic a eu lieu ? Pas vraiment : « Il se met à pleuvoir pendant mon échauffement, ça me mine le moral mais je relativise vite en me disant que ce sera la même chose pour tous ».
Pas de chance, pourtant : la pluie s’arrête pour son run et Loïc s’engage sur une piste bien trempée et qui tendra forcément à sécher pour le passage des derniers concurrents. « Sur le coup, je n’avais plus trop envie de me battre, le feu s’était un peu éteint en moi. Ça glissait vraiment, je l’ai joué safe. En plus je commets une erreur, je sors de ma trajectoire et tord mon plateau après le 3e temps intermédiaire. Je ne pouvais plus pédaler. Il n’y a vraiment rien qui allait ».
14e de la Finale (+9.058 secondes), le pilote du team Specialized Gravity rétrograde à la 5e place au classement général mais ne s’inquiète pas pour autant : « Vu le format de course, je sais que c’est rattrapable. Les points sont bien répartis entre la demi-finale et la finale. Tout est encore jouable ».
L’arrivée des jeunes loups
Le nouveau leader est le vainqueur sortant de la manche italienne, à savoir Jackson Goldstone. Le jeune canadien de 19 ans a en effet remporté sa première Coupe du Monde Élites dès sa première année dans la catégorie tout comme son rival de toujours et nouveau coéquipier de Loïc, Jordan Williams, vainqueur de l’étape d’ouverture de Lenzerheide (Suisse) le mois dernier.
Que faut-il en penser ? « Pour moi le VTT a pris un tournant flagrant avec l’arrivée des jeunes ayant évolué avec un univers Bike Park et des vélos adaptés. » répond Myriam Nicole. « Ils savent faire du vélo mieux et plus tôt. On a déjà eu le cas chez les femmes avec Vali Höll et nous avons maintenant Jackson et Jordan en exemple. Ces jeunes ont développé des capacités physiques impressionnantes, ils savent faire du vélo et c’est beau ! Je ne sais pas quelle marge de progression cela laisse mais ce qui est certain c’est qu’ils n’ont pas peur ! » poursuit Pompon qui, malgré son absence en compétition, continue de suivre les évènements de près.
Loïc enchaine : « Je suis épaté car moi ça m’a pris 3 ans avant de gagner chez les Élites ! Ils sont forts. Eux ne se posent pas de questions. Ils ont une construction solide, ils mettent du gaz ».
Bref faudra donc composer avec ces jeunes talents cette année. « Je ne me m’attarde pas sur leur âge, ce sont avant tout des concurrents. » poursuit Loïc. « Après, je suis ravi de mon équipe (Finn Iles 2e au général, Jordan Williams 6e), on performe tous, on a une superbe dynamique, mon team manager Laurent (Delorme) fait un boulot exceptionnel à veiller à ce que l’on puisse tous avoir un bel environnement. Les vibes sont bonnes ».
L’étape de Val di Sole, pour Loïc, était également la dernière manche de la saison avant les Championnats du Monde, à l’occasion desquels il remettra en jeu son maillot arc-en-ciel : « J’étais forcément un peu dégouté de terminer sur une performance médiocre avec ce maillot. J’aurais été content de le porter un peu plus ».
Le Niçois s’élancera sur les Championnats de France ce weekend (Les Arcs). Puis, il ira rouler sur le test event de Loudenvielle (lieu de la cinquième manche DH 2023 du 1er au 3 septembre) avant de tout miser pour décrocher ce graal ultime pour une septième fois en terres écossaises : « J’ai toujours manqué d’enthousiasme pour Fort William, certainement à cause de sa météo particulière et de son lieu quelque peu unique. Mais promis, j’ai commencé à me détendre et à mieux l’appréhender ». Que nous réserve-t-il ? Réponse le 5 août prochain.
Myriam Nicole : la patience est d’or
Toujours absente du circuit, Myriam Nicole poursuit sa convalescence après sa commotion cérébrale de février dernier. Et les nouvelles sont rassurantes : « Je multiplie les voies de guérisons et je joue sur tous les paramètres qui peuvent jouer : vestibulaire, cognitif, ostéo et reprise progressive de l’entraînement. Je suis allée voir des spécialistes sur Zurich, à Lyon, je n’arrête pas ! On sait qu’il y a un hic dans les connexions de mon cerveau et qu’il faut tout remettre en place. On ne trouve juste pas comment alors on teste différentes options. C’est un domaine encore pauvre en données. On sait aller sur la Lune depuis des années mais on pèche encore là-dessus » conclut-elle, ironique.
Impossible, donc, d’annoncer une date de retour à la compétition. Il est encore trop tôt. « J’essaie de revenir au plus vite mais je me rends compte que c’est compliqué. Je m’étais fixée la date des Championnats du Monde en Ecosse (le 5 août 2023 à Fort William) mais avant de reprendre la DH, il faudra d’abord que je n’ai plus de symptômes sur vélo de route. Lorsque je regarde la manche de Val di Sole, je me rends compte qu’il fait être prête et solide. C’est d’ailleurs pour ça que l’on s’entraîne en général tout un hiver et là… je ne suis clairement pas prête ».
Vainqueur en 2022, Myriam doit encore patienter pour revivre un tel succès
© Bartek Wolinski/Red Bull Content Pool
Et le moral dans tout ça ? « Il est bon, je trouve du bonheur ailleurs ! J’ai beaucoup d’avis positifs depuis plusieurs semaines et je vois l’évolution, ne serait-ce que dans mon énergie générale. Je me rappelle regarder Tahnée (Seagrave, qui a subi elle aussi une grosse commotion cérébrale l’an passé ndlr) et je me disais : qu’est-ce qu’elle fait ? Aujourd’hui je comprends. C’est long, on avance un peu dans l’inconnu et tout ce qu’on peut faire c’est d’appliquer les recommandations des spécialistes et d’être patient. Je suis aujourd’hui sur une base saine, je suis bien suivie. J’ai confiance ! »
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