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Ski

Manon Loschi : “je comprends tout de suite que je suis dans une avalanche”

Pour la sortie du film Calm Beneath Castles dans lequel on la retrouvera, on a posé des questions à Manon Loschi. Le tournage, son tête à tête avec une avalanche, sa saison 2024… entretien.
Écrit par Red Bull France
Temps de lecture estimé : 9 minutesPublished on
Quatrième pour sa première saison sur le Freeride World Tour, Manon Loschi n’a pas grand chose à prouver lorsque ses skis sont chaussés. Avec la sortie du dernier film de Matchstick Productions, Calm Beneath Castles, elle est revenue avec nous sur le projet et bien plus encore.

Tu peux nous parler de Calm Beneath Castles ?

En gros, avec Max (Palm, un autre skieur freeride N.D.L.R), ils nous ont contacté en début de saison, à l’automne, pour qu’on fasse partie du film. Nous, on était trop contents, trop chauds. Ce sont des films qu’on regarde depuis tout jeune, c’est incroyable d’en faire partie. Il fallait juste trouver un bon créneau, avec les compétitions, donc on a décidé de tourner en avril, juste après les dernières étapes du Freeride World Tour.

On est allé à Whistler, pour faire un trip en motoneige. Le but, c’était de se balader dans le backcountry et de skier des lignes un peu cool. Niveau conditions, c’était pas ouf, il n’y avait pas beaucoup de neige, et on a pas eu de chance avec la météo, c’était souvent un peu de brouillard, un peu jour blanc. Mais c’était quand même trop bien d’être au Canada, de se balader un peu partout, et à la fin on a eu un peu de neige, on a pu filmer : super cool.

Combien de temps a duré le tournage ?

On était sur place deux semaines, et on a tourné pendant 5 à 7 jours.

Les skieurs Manon Loschi et Max Palm dans le film Calm Beneath the Castle à regarder sur Red Bull TV.

Manon Loschi et Max Palm

© Loris Poussin

Comment ça se passe pour monter ? Vous partez tôt le matin ?

On part tôt le matin, oui. Là-bas, les gens montent en voiture, se garent, puis continuent en motoneige. Tu fais une petite heure de route, tu t’enfonces un peu dans la montagne, et ensuite tu prends les motoneiges pendant 1 à 2 heures pour arriver sur le spot. Là, comme c’est glacé, il faut s’arrêter régulièrement pour que la moto puisse refroidir, c’était une mission pas possible. Une fois sur le spot, tu regardes ce qui peut être cool à faire, ce qui est encore en bonnes conditions. La plupart du temps, tu arrives à monter en haut des runs en motoneige, ou pas très loin.

Vis-à-vis des lignes et figures, tu en discutes avec le réalisateur en amont ?

Normalement, tu as le choix de faire ce que tu veux. Mais là, avec les conditions, on était plus contraints de rider ce qu’il y avait. Dès qu’on voyait une petite face, on choisissait chacun une ligne, on en parlait avec les équipes pour savoir où est-ce qu’ils voulaient se placer, de qui droppait (partait N.D.L.R) en premier etc. Comme pour une compét, on se pose en bas pendant 5 minutes, on fait du repérage, ensuite on monte, on attend qu’ils se placent, et on y va.

Qu’est-ce qu’on ressent quand on sent qu’une avalanche se déclenche alors qu’on descend ?

Bizarrement, je n'ai pas eu peur. En fait, au début, je n’avais pas trop compris. J’atterris de mon dernier petit saut à la fin, je passe un genre de bosse, et je me dis : ‘C’est bizarre, il n'y avait pas de bosse sur le run que j’avais prévu, c’était tout lisse’. Et là je tourne la tête, et je vois des vagues de neige, je comprends tout de suite que je suis dans une avalanche. J’ai eu un petit boost d’adrénaline, j’ai fait un tout droit, mais j’ai pas du tout eu peur, j’étais hyper focus. Ça m’a un peu mis dans un état de flow en quelques secondes dans lequel j’étais super concentrée, j’ai trouvé ma sortie et j’ai pu m’échapper sans problème. C’était assez ouf, je n’avais jamais eu d’expérience avec des avalanches auparavant, c’était quelque chose (rires).

Manon Loschi skie pendant le tournage du film Calm Beneath the Castle.

Manon Loschi en pleine descente

© Loris Poussin

Tu as été à une des diffusions de Calm Beneath Castles ? Qu’est-ce que tu as pensé du film ?

Je suis allée à Innsbruck début octobre. C’était cool. Il y a toujours un peu de frustration parce qu’on a pas eu les conditions. Notre partie est cool, mais on aurait voulu montrer plus de ski, plus de niveau. On est quand même hyper contents d’avoir fait partie du projet, le reste du film était trop cool aussi !

Tu as fait pas mal de choses avec Max Palm, comment vous êtes-vous rencontrés ?

On s’est rencontré sur les compétitions du Freeride World Tour Junior, quand on avait quelque chose comme 15 - 16 ans. On est devenu vraiment amis il y a quelques années. On a le même manager, on a des sponsors en commun comme Red Bull. Avec les compéts, notre emploi du temps est un peu similaire. L’hiver dernier, on a voyagé quasiment tout le temps ensemble, tout au long de la saison. C’est trop cool, on rigole trop. On est un peu pareil, on s’entend trop bien. On a la même vision du free ski, du sport et de notre manière de rider. C’est une trop bonne relation, un super ami.

Les skieurs freeride Manon Loschi et Max Palm en action.

Le meilleur duo de ski freeride

© Louis Nauche

Quel est ton ressenti par rapport à ta saison sur le Freeride World Tour ? Tu ne termines pas sur le podium, mais tu as fait de sacrées perfs !

J’ai des sentiments partagés. C’était cool, j’ai toujours voulu y aller, c’était dans la continuité de ce que j’avais fait jusque là. En faire partie, avec tout le monde, c’est super rigolo. Après, je suis un peu restée sur ma faim. J’aurais bien aimé faire de meilleurs résultats, skier un peu mieux que ce que j’ai fait à certains moments, et surtout, ça prend énormément de temps pendant la saison.

Pendant 2 mois et demi, tu ne skies pas vraiment, tu voyages beaucoup, tu fais un run par ici, un run par là. J'avais vraiment envie de skier, et même dans le processus de préparation, tu n’as pas le temps d’apprendre de nouvelles choses, tu travailles ce que tu connais déjà. J’avais l’impression de stagner, d’avoir une petite pression, d’avoir peur de me blesser. Quand ça s’est terminé, je voulais filmer à fond, mais les conditions n’étaient plus trop là.

C’était quand même une super expérience, ça me permet aussi de plus me rendre compte de ce que j’ai envie de faire dans le futur. Je suis plus branchée sur l’aspect créatif, les films, la création d’images, c’est pour ça que j’ai décidé de me concentrer là-dessus cette année.

C’est vrai qu’en compétition, tu as tenté un double backflip. Peut-être que d’autres auraient choisi de jouer la sécurité pour assurer le résultat, pas toi.

Ouais, ça ne m’intéressait pas de me la jouer stratégique, à essayer de gratter des points à chaque compétition. J’avais surtout envie de faire des runs qui me plaisaient, qui m’inspiraient, de montrer ce que je sais faire, sans me brider. Du coup, c’est vrai que ça a moins marché niveau résultats, mais je n’ai aucun regret. Si je n’avais pas tenté le double backflip, je m’en serais voulu. J’avais toujours eu envie de le tenter en compétition.

Qu’est-ce que tu as retenu de cette saison ?

C’est dur à dire. Les endroits où on allait, c’était jamais les meilleures conditions donc tu es un peu sur la retenue. Il y a beaucoup d’émotion, de la pression… c’est dur d’en retirer grand chose. Ça m’a fait comprendre que mon meilleur ski, c’était quand je m’amusais, et pas en me sentant forcée de rider à un endroit, à un moment.

Est-ce que tu peux nous parler un peu de tes projets pour l’année prochaine ?

Cette année, je vais me concentrer sur la vidéo. L’année suivante, on verra. J’ai un projet perso que je vais faire tout au long de la saison, j’ai quelques idées aussi avec Red Bull à la maison, je dois filmer avec MSP (Matchstick Productions N.DL.R), j’aimerais bien participer à quelques événements aussi cet hiver. Ce qui est cool, c’est que mon emploi du temps est beaucoup plus ouvert et modulable. Je vais pouvoir faire plein de choses qui me font kiffer. J’ai trop hâte de remettre les skis, de commencer à voyager et à skier.

De qui et quoi est-ce que tu t’inspires ?

Mes plus grosses inspirations dans le ski, c’est Candide Thovex, Sean Pettit, Sammy Carlson… les légendes, les OGs (Original Gangster N.D.L.R) on va dire (rires). Et sinon, je m’inspire beaucoup du snowboard, du surf, du skate. Je trouve que c’est cool de s’inspirer d’autres sports qui sont dans le même esprit de glisse. Ça permet d’étendre sa créativité, de voir le terrain différemment, ça m’aide à ouvrir ma créativité quand je regarde la montagne. La musique, ça m’inspire de ouf aussi. Tout ce qui est créatif, j’essaye de m’en imprégner et de le retranscrire dans mon ski.

Quel type de musique est-ce que tu écoutes quand tu descends ?

J’avoue que je n’écoute pas de musique quand je skie. Je n’ai jamais trop essayé, mais les fois où je le fais, c’est quand je ride toute seule, parce que sinon, je m'ennuie un peu (rires), ça me permet de garder une bonne vibe. Sinon, je suis concentrée sur le moment.

Par contre, en compét, quand je monte avant de rider, j’ai mes écouteurs et j’écoute du hip-hop, du rock… des trucs comme ça.

Manon Loschi marche dans la poudreuse avant une descente en ski freeride.

Les longs moments avant le grand saut

© Louis Nauche/Red Bull Content Pool

Il y a des artistes en particulier qui te mettent dans le bon mood pour rider ?

J’écoute beaucoup de hip-hop old-school comme Nas, Mob Deep, Biggie… tous les gros noms du rap américain. Sinon j’écoute beaucoup de rock aussi. Je n’ai pas trop de noms comme ça, mais j’aime bien les trucs un peu underground et pas trop connus. Mais avant les compéts, c’est surtout hip-hop, ça met bien dans l’ambiance. Kendrick Lamar, les trucs comme ça, ça me chauffe bien.

Retrouvez le film Calm Beneath Castles, la dernière production de ride qui fait la part belle au freeski, avec Max Palm, Manon Loschi et beaucoup d’autres.