Ils sont en manque. De vitesse, d’adrénaline, d’excitation, de passes d’armes et d’explications en tutoyant les 300 km/h. Depuis le début du confinement, les stars de la Formule 1 et du MotoGP patientent en silence, immobilisées au même endroit alors qu’ils ont l’habitude de parcourir le monde. Pierre Gasly est confiné à Dubaï. Entre deux séances de sport et de jeu en simulation, il y a la console aussi. Et le pilote AlphaTauri s’est autorisé une partie de Fifa avec son homologue français de MotoGP, Fabio Quartararo, diffusée sur Canal+. Les deux hommes s’apprécient. Pierre Gasly en témoigne : « à l’origine, nous sommes tous fans de sports mécaniques. Fabio, je le suis depuis qu’il fait de la Moto3. On a eu la chance de se rencontrer dans les paddocks de temps en temps. Il m’a rendu fou plus d’une fois derrière la télé ! »
« En MotoGP, ce sont des tarés »
Pierre Gasly assure qu’il regarde toutes les courses lorsqu’il est chez lui. « J’aime beaucoup Fabio (Quartararo), Marc (Marquez), Dovi (Dovizioso) ». La saison dernière, il s’était rendu à Buriram, en Thaïlande, lors du Grand Prix de MotoGP. Et le pilote Alfa Tauri est bien tombé : il s’agit du week-end où Marc Marquez a été titré champion du monde pour la 6e fois dans la discipline. « C’était une expérience complétement folle ! » À l’image de Pierre Gasly, les pilotes de F1 sont nombreux à s’être rendus dans les paddocks de MotoGP la saison dernière. Lewis Hamilton (Mercedes) était présent à Losail, au Qatar, pour la manche inaugurale de 2019. Charles Leclerc (Ferrari), lui, a assisté au Mugello (Italie) à la victoire d’un autre pilote d’une écurie italienne, Danilo Petrucci (Ducati).
Daniel Ricciardo, lui aussi, est un assidu de la discipline. « J’ai toujours été fasciné par les deux roues », souligne l’ex-pilote Red Bull, désormais chez Renault. L’Australien apprécie suivre les performances de son compatriote, Jack Miller, pilote incontournable de MotoGP depuis 2015. Cette affection pour les deux roues, Romain Grosjean (Haas F1) est peut-être celui qui la résume le mieux : « en MotoGP, ce sont des tarés et ils pensent certainement la même chose que nous. Le suspense et le fait que chacun ait une chance de triompher, c’est ce qui nous donne de superbes courses. »
Ce que Rossi et « Schumi » ont changé
Historiquement, il y a toujours eu des passerelles entre les deux disciplines. « Certains pilotes sont passés de la moto à la F1 comme John Surtees (années 1960), Mike Hailwood (années 1970) mais aussi Giacomo Agostini (années 1980) sans le même succès », souligne Jean-Louis Moncet, journaliste accrédité en F1 depuis une trentaine d’années. Pour lui, si le paddock de la discipline-reine automobile était peu intéressé par la moto du temps du duel Prost-Senna, tout a changé avec deux hommes. Il y a eu Michael Schumacher, qui « était un habitué des sessions de moto, au point qu’on l’avait soupçonné de s’y être blessé. »
Et puis il y a Valentino Rossi. « Sa personnalité extraordinaire a suscité un enthousiasme incroyable du grand public et du monde de la F1. Il a totalement transformé la perception de la MotoGP », décrypte Jean-Louis Moncet. Alexander Albon (Red Bull) fait d’ailleurs partie des fans inconditionnels de l’Italien. « Quand j’étais gamin, j’avais des stickers ‘Rossi46’ sur mon karting. J’adore son attitude, son côté charismatique en dehors de la piste et son sérieux en course. » Il s’amuse de son numéro, le 23, la moitié de celui de Rossi (le 46). « Si j’avais pris le n°46, personne ne dira ‘c’est le numéro d’Alexander Albon’ mais tous diront que c’est celui de Rossi ! » Comme le Thaïlandais, Lando Norris est fan du champion italien. « J’avais cinq ans environ quand je l’ai vu la première fois et je l’ai instantanément aimé ». Le pilote McLaren assure « avoir d’abord regardé le MotoGP avant de regarder la F1 ».
Lewis Hamilton est allé plus loin. En décembre dernier sur le circuit de Valence, le Britannique a échangé sa monoplace contre la Yamaha de Valentino Rossi. Et le sextuple champion du monde de F1, qui s’était rendu au GP du Qatar il y a un an, a impressionné au guidon de la YZR-M1. « Il a réalisé une grande performance, d’autant qu’il est très difficile d’aller vite sur une moto en piste et encore plus en pilotant une MotoGP d’usine », raconte Lin Jarvis, le patron de Yamaha Motor Racing. Un enthousiasme partagé par Valentino Rossi : « Lewis s’est beaucoup amusé, à tel point qu’il rechignait à arrêter de piloter ! » Et si d’autres pilotes F1 l’imitaient ? Et si l’un d’entre eux devenait le premier à passer d’une discipline à l’autre ? Affaire à suivre… Entre passionnés !