Portrait de Lyna Mahyem, ISK, AniBeatz, Gregk et Ange lors de leur enregistrement de Sur Mesure aux Red Bull Music Studios.
© Agathe Caire
Musique

5 sons taillés pour parler aux générations futures

Parler aux jeunes fans de rap dans ses textes pour leur donner des conseils de vie, ça peut vite avoir l’air relou. N’empêche, à chaque fois que les rappeurs le font, c’est avec un message fort.
Écrit par Florian Perraudin-Houssard
Temps de lecture estimé : 5 minutesPublished on
Vouloir s’adresser à la nouvelle génération est une démarche louable. Le risque, c’est de sonner comme un donneur de leçons. D’avoir un discours moralisateur ou vieux jeu. Pourtant, de nombreux artistes ressentent la responsabilité de transmettre, et certains le font avec brio. Souvent, ça vient de leur rôle dans leur famille, qu’ils soient parents, grands frères ou grandes sœurs. Une tradition qui remonte à “Petit frère”, le classique d’IAM sorti en 97. Aujourd’hui, c’est Lyna Mahyem et ISK qui doivent relever le défi lancé par Red Bull d’écrire le son parfait pour s’adresser à la génération future. Une première dans Red Bull Sur Mesure, puisqu’il s’agit d’un featuring ! Les producteurs AniBeatz et Gregk vont composer avec eux une instru mélancolique, qui risque bien de nous prendre par les sentiments…
Voilà 5 sons dans lesquels les artistes rap prennent le micro pour parler à la nouvelle génération, le plus souvent à leurs enfants, avec quelque chose d’important à leur dire.
01

“Enfants forts” : la tête haute

“Tout le monde veut sauver la planète, mais personne veut descendre les poubelles”, ironise Médine dans “Enfants forts.” L’artiste, lui, prend ses responsabilités. Lors de la polémique du Bataclan, Médine est pris pour cible et reçoit des menaces de mort. Inquiet pour sa famille, il écrit ce titre pour ses 3 enfants Massoud, Ghenghis et Mekka. En bon père de famille, il affirme qu’il vaut mieux “construire des enfants forts” que “réparer les adultes cassés.” Il s’adresse à sa progéniture, avec l’espoir de lui donner toutes les armes pour se battre dans un monde où les tensions s’accentuent. Médine invite ses enfants à rester dignes face à la haine et à y répondre par la paix. Haut les cœurs !
“Enfants forts” – Médine
02

“OH MADELEINE” : une ôde à la joie

Face à ses idées noires, Disiz oppose une simple vision de sa fille qui danse. La lumière qui illumine son quotidien et qui lui rappelle pourquoi la vie vaut le coup d’être vécue. “OH MADELEINE”, c’est à la fois une lettre à sa petite fille et une ôde à la joie. Une ballade légère, pour soulager le poids du monde qui s’écroule sur nos épaules. Accablé par l’état dans lequel on laisse notre planète à la génération future, Disiz n’en reste pas moins positif. Car “rester en vie est une noble cause”, comme il le dit lui-même à son bout de chou. Une interprétation pleine de tendresse, pour une chanson aussi douce qu’un accord de Rhodes. “Shine”, Madeleine !
“OH MADELEINE” – Disiz
03

“DEUX TOILES DE MER” : prends le temps

Un message vocal de son fils et Damso brise l’armure. Le soit-disant dur à cuire ouvre son cœur sur une mélodie de piano feutrée, pour répondre à son fils en musique. “Tu m’as changé, lui dit-il simplement. La paternité a poussé Damso à revoir ses priorités et à ne plus “faire passer [sa] carrière avant l’amour.” Au final, à quoi bon être une star, si c’est pour être un “père absent” ? Plus attentif à son rôle de parent, la tête d’affiche du rap belge n’a pas l’intention de mourir avec des regrets. Une transformation qui a peut-être préfiguré le départ pour son tour du monde en camping-car. Une pause dans sa carrière qui a fait grand bruit. Prendre le temps, c’est important !
“DEUX TOILE DE MER” – Damso
04

“Non” : non, c’est non !

Lourd sujet qu’aborde A2H dans “Non” : celui des violences sexuelles. Une proche de l’artiste a été victime d’un viol conjugal, qu’il relate avec tristesse, douleur et rage. Plutôt que de chercher à se venger et à prolonger le cycle de la violence, la jeune femme a suggéré au rappeur et guitariste d’en faire une chanson. “Jeunes filles et jeunes garçons, ça pourrait les aider”, chante A2H pour expliquer sa démarche. Outre le fait qu’il sensibilise les jeunes à la notion de consentement –la base de tout rapport sexuel–, l’artiste met en lumière les dégâts irréversibles que causent les agressions sexuelles sur les victimes, dont la vie est à jamais impactée. Une fois de plus, “non, c’est non” !
“Non” - A2H
05

“Sublime” : n’aie pas peur

Tuerie fait un parallèle entre sa situation familiale –lui qui a grandi avec un père violent– et sa relation avec son propre fils, qu’il cherche à protéger. Dans “Sublime”, le nouvel espoir de Foufoune Palace évoque une figure diabolique (son paternel ?) et décrit ses jeunes années comme un “enfer”. Enfer qu’il raconte dans “Tiroir Bleu”, l’autre titre phare de son EP Bleu Gospel, paru en 2021. “Mais toi, n’aie pas peur”, dit-il à son fils avec douceur. Car en sa propre femme, la mère de son enfant, Tuerie a pleine confiance. En même temps qu’il prend du recul, il chante sa gratitude envers sa moitié, pour l’avoir “réparé” à force de douceur et de patience. “N’est-elle pas sublime ?”
“Sublime” – Tuerie
En plus de ces sons, on pense bien sûr à “Notes pour trop tard” (feat. Ibeyi), où Orelsan s’adresse à lui-même plus jeune et enchaîne des vérités qui s’appliquent à tous, et “Mon roi”, où Youssoupha parle à son fils avant de lui laisser le trône.