Retour sur trois épisodes de la série South Park qui abordent le jeu vidéo.
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Quand South Park s’attaque au jeu vidéo

Délicieux retour sur trois épisodes de la série South Park qui n’y sont pas allés avec le dos de la cuillère sur le jeu vidéo.
Écrit par Kere
Temps de lecture estimé : 7 minutesPublié le
L’iconique série animée de Trey Parker et Matt Stone a fêté cette année ses 22 ans et avec plus de 300 épisodes à son actif, et tout le monde a été délicieusement égratigné, jeu vidéo compris. Les références vidéoludiques sont nombreuses, et ce depuis toujours. Souvent très pertinentes, comme pour l’essentiel des sujets abordés sans pincette, ces critiques tapent souvent justes, là où ça fait mal, marquant les esprits. Revenons sur trois épisodes bien précis. Allez, allons faire un tour à South Park pour oublier tous nos soucis.
Par le biais de Jenkins dans South Park, Trey Parker s’attaque au cliché du joueur du jeu vidéo WoW, le geek solitaire, enfermé chez lui devant son ordi à boire et à manger n’importe quoi.

Jenkins

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Make Love, Not Warcraft

En octobre 2006 était diffusé un des épisodes les plus célèbres de la série animée. Son sujet principal : World of Warcraft. À cette époque, le MMO de Blizzard était un vrai phénomène, intriguant les médias généralistes, notamment sur le bouillant sujet du temps de jeu avec des conclusions souvent fantasmées. Il faut dire qu’à ses débuts, WoW ne faisait pas les choses à moitié, étant chronophage à souhait, surtout si vous vouliez briller en PvP. Les spécialistes, dont certains fort douteux, pointaient du doigt. Les joueurs se défendaient, avec, il faut bien l’avouer, une petite dose de mauvaise foi. C’est alors que Trey Parker a sorti l’artillerie lourde, signant le scénario et la réalisation d’un épisode devenu culte.
Nous y suivons toute la petite bande découvrant Azeroth dans la cave de Cartman. Une grande partie de l’aventure se déroule dans le jeu directement, quittant l’animation classique du show pour l’occasion. “Make Love, Not Warcraft” s’attaque alors à tous les sujets sensibles ou récurrents concernant le MMO, ses vannes redondantes, les clichés qu’il véhicule et des aspects plus vrais que nature. Le joueur acharné de WoW ne peut se rendre qu’à l’évidence : South Park se joue de nous et tape dans le mille, avec une parfaite connaissance du MMO et de l’image qu’il dégage.
L'épisode "Make Love, Not Warcraft” de South Park s’attaque à tous les sujets sensibles ou récurrents concernant les jeux vidéo MMO.

Make Love, Not Warcraft

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On commence donc pas l’aspect routinier et assez vide des quêtes puisque nos aventuriers s’acharnent sur des sangliers afin de prendre de l’expérience. Le stuff est aussi de la partie, tout comme le fléau du début du MMO : le gank ou chain kill. Ici, c’est Jenkins, un personnage de haut niveau qui enchaîne les 4 amis encore trop faibles pour pouvoir répliquer. C’est tout l’enjeu de l’épisode d’ailleurs. Par le biais de Jenkins, Parker s’attaque au cliché du joueur de WoW, le geek solitaire, enfermé chez lui devant son ordi à boire n’importe quoi et à manger de la même manière. Jenkins est obèse, affalé. Avec ce portrait, et le succès de l’épisode, de la série, South Park a contribué à véhiculer cette image fausse du joueur de WoW et de geek au sens plus large. Changer cette image a été un des enjeux des années suivantes, notamment dans l’esport avec des joueurs et joueuses athlétiques et hyper tendance question mode. On pense notamment à certaines campagnes de publicité d’entreprises gravitant dans le show vidéoludique ou à la mise en avant de joueurs comme Snoopeh, la star d’EG sur League of Legends.
Les personnages de South Park abandonnent tout pour s’enfermer chez Cartman, et monter en niveau dans le jeu vidéo World of Warcraft.

Toute la petite bande de South Park se met à jouer à WoW

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Cet épisode ne passe pas à côté de la question du temps de jeu. Les amis abandonnent tout pour s’enfermer chez Cartman, monter en niveau pour s’offrir la tête (virtuelle) de Jenkins. Ils y jouent tellement qu’ils s’alimentent devant l’écran et y font même plus. La scène aussi trash que culte de Cartman appelant sa maman pour lui tenir une bassine pendant qu’il fait ses besoins en jouant est restée dans les mémoires. Elle fait écho, à la sauce zéro limite de South Park, à cette image du geek acharné qui utilise des bouteilles histoire de s’épargner un voyage aux WC…
Autre aspect intéressant dans cet épisode : le conflit générationnel qui entoure le jeu vidéo, entre parents et enfants. Ici, choix est fait d’un rapprochement plutôt qu’une énième incompréhension : Randy, le père de Stan, joue également et découvre cet univers captivant. Ce n’est pas la seule fois que ce procédé est utilisé, puisque nous le retrouverons dans un épisode sur Minecraft. Mais là est une autre histoire...
Animation différente pour les scènes chez Sony

Animation différente pour les scènes chez Sony

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La guerre PS4 - Xbox One

Faisons un saut dans le temps maintenant et arrêtons nous sur l’épisode en trois parties autour du Black Friday et de Game of Thrones. La sulfateuse est de sortie avec un démontage en règle des excès de cette journée de surconsommation faisant d’innombrables victimes sans peiner personne. Randy est vigile d’un supermarché assiégé par des acheteurs présentés comme les zombies de The Walking Dead. Mais les pratiques commerciales de Sony et Microsoft prennent cher également, avec une importante intrigue sur la guerre qui oppose les enfants concernant l’achat des nouvelles consoles, entre les pro-PS4 et les pro-Xbox One. Un débat que l’on a que trop bien connu et qui persiste encore, ici et là. La série met en scène les big boss des deux entreprises qui interviennent à South Park, dont Bill Gates. Il est question notamment de proposer l’offre commerciale la plus folle, quitte à rendre encore plus dangereux le jour du Black Friday.
Bill Gates sur le ring

Bill Gates sur le ring

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Très drôles, ces trois épisodes sont aussi très gores et sans la moindre pitié. Ils se concluent par une morale classique de la série : finalement, sommes-nous pas mieux sans jeu vidéo, plutôt que de nous étriper pour les avoir ou imposer notre point de vue ? C’est alors que les ultimes secondes laissent apparaître une grosse publicité pour le premier jeu vidéo South Park développé par Ubisoft. Le troll, brutal, atteint des sommets.
Les free-to-play expliqué aux enfants

Les free-to-play expliqué aux enfants

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Jeux gratuits payants

L’épisode 6 de la dix-huitième saison de South Park place également les jeux vidéo au coeur de l’intrigue et pose déjà davantage problème. Non par son contenu mais plutôt pour ce qui est arrivé après. Explications !
Ici, les enfants découvrent un jeu free-to-play sur mobile dédié à Terrence et Philip, les deux mégastars du Canada. Le principe ressemble à une tonne de jeux existants : cliquer, ramasser, construire, être limité, gagner peu et se voir proposer moult achats en jeu. L’épisode cible ici le micro-paiement, les pratiques souvent lourdes pour inciter à passer à la caisse (Stan reçoit de nombreuses notifications), le faible intérêt du jeu en lui-même, l'accoutumance et les dérives liées aux achats multiples. On y découvre que tout ceci n’est qu’un plan diabolique du Canada pour cibler les personnes vulnérables et leur prendre un max afin de financer programmes et bâtiments canadiens, le tout en utilisant sans pitié des personnalités ou franchises célèbres. On peut y voir une attaque non déguisé au jeu mobile des Simpsons qui ressemble énormément à celui de Terrence et Philip, et qui est sorti en 2012. Populaire, il rapportait à l’époque énormément de dollars.
Un jeu, un seul achat, une autre époque

Un jeu, un seul achat, une autre époque

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L’épisode est terriblement pertinent et percute si vous êtes un joueur de ce genre de jeux. Il fait réfléchir. Un autre point y est habilement soulevé : Cartman explique, l’air de rien, qu’un jeu classique, qu’un jeu d’une époque qui semble lointaine, est bien plus intéressant et réglo. Cela fait écho aux transformations du marché du jeu vidéo qui encouragent énormément aux micro-transactions, loin de ce que l’on connaissait avant : un jeu à acheter, à jouer, et guère plus. Pas de boutiques avec du cosmétique, pas de season pass, pas de précommandes avec divers avantages.
Mais voilà, cet épisode fait un peu tâche. Trois ans après sa diffusion, un jeu free-to-play aux très nombreuses micro-transactions est arrivé sur les stores : South Park Phone Destroyer. La licence est alors utilisée pour des pratiques plus ou moins similaires à celles violemment condamnées dans l’épisode de 2014. De fait, tout ceci laisse un goût amer.
South Park Phone Destroyer

South Park Phone Destroyer

© Ubisoft

Le monde du jeu vidéo s’est invité bien d’autres fois dans cette charmante ville du Colorado qu’est South Park. Nous y reviendrons surement, histoire de prendre un peu l’air. D’autant qu’il n’y a que des visages amicaux, des gens gentils, bien comme il faut.