Les voitures de Formule 1 représentent un point de rencontre entre sport et science. En cherchant à être à la pointe de la performance, les ingénieurs sont poussés à constamment innover. Il suffit de demander à Max Verstappen, lui qui connaît si bien l'importance de chaque petite amélioration dans la course au titre. La nuit précédant le Grand Prix de Singapour 2024 en est un bon exemple : Verstappen et son équipe avaient apporté quelques modifications à sa voiture pour augmenter ses chances, et ces changements de dernière minute ont porté leurs fruits.
« Je suis très heureux de cette deuxième place [...] Le mérite en revient à l'équipe pour son travail acharné, elle a trouvé de bonnes solutions, [elle] a apporté beaucoup de changements à la voiture pendant la nuit, et cela a fait une énorme différence », a déclaré Verstappen. « La voiture était beaucoup plus agréable à conduire, nous pouvions attaquer les virages un peu plus, et nous avons vraiment maximisé nos performances. »
Verstappen et son équipe comprennent que les moindres ajustements peuvent faire la différence entre une pole et une place dans les points. Les ingénieurs de F1, comme ceux de l'équipe de Verstappen, ont étudié la conception des voitures tout au long de l'histoire de la discipline dans l'espoir d'améliorer l'aérodynamisme et la vitesse. L'évolution des voitures de F1 a été une quête incessante de perfection. Découvrez comment ces magnifiques machines ont évolué au fil des décennies.
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Les débuts (1950-1960)
Les origines de la F1
Les premiers balbutiements de la Formule 1 remontent techniquement aux années 1890, lorsque les premières courses sur route ont gagné en popularité dans l’Hexagone au début du XXe siècle. Toutefois, le monde des sports mécaniques de compétition a connu plusieurs phases avant que la F1 n'entre en piste. En 1901, le premier « Grand Prix » a eu lieu, et il a fallu attendre encore quelques décennies pour que la F1 devienne une discipline officielle. La Fédération internationale de l'automobile (FIA) a normalisé les règles de course en 1946, mais la F1 moderne n'a officiellement démarré qu'en 1950.
Des débuts historiques
Le nom « Formule 1 », connu à l'origine sous le nom de « Formule A », fait référence aux règles que chaque participant doit respecter. Ces règles couvrent toutes les spécifications techniques, ou « formules », qu'un pilote doit suivre dans la conception de sa voiture, y compris l'aérodynamique, le poids et le cylindre du moteur. La première course de F1 a eu lieu à Pau, dans le sud-ouest de la France, en 1950. Un mois plus tard, le premier championnat du monde s'est déroulé sur le circuit de Silverstone, au Royaume-Uni.
Les premières F1 étaient loin d'être les bêtes aérodynamiques d'aujourd'hui. À l'époque, l'absence de prise en compte de l'aérodynamique nuisait souvent à la conduite. Des pilotes comme Juan Manuel Fangio et Stirling Moss ont souvent été victimes d'accidents lors de manœuvres sur des circuits difficiles. Ils ont néanmoins réussi à évoluer avec succès sur ces derniers à plusieurs reprises, Fangio ayant remporté cinq titres dans les années 50.
Les premiers changements de la F1
L'année 1958 marque un tournant important en F1 avec l'introduction du premier règlement de course majeur. La taille des circuits est ramenée d'environ 450 à 320 kilomètres, et les pilotes doivent utiliser du carburant Avgas. C'est également la première année où une voiture titrée est conçue avec un moteur placé derrière le siège du pilote. Cette voiture était une Cooper, pilotée par Moss lors du Grand Prix d'Argentine.
En 1961, les autorités de régulation ont tenté de réduire la vitesse en piste en exigeant que les moteurs soient de 1,5 litre, et non suralimentés. Cette décision est annulée cinq ans plus tard : en 1966, les pilotes de F1 sont autorisés à utiliser des moteurs de 3 litres.
Les années 1960 marquent également l'avènement de l'ère Lotus en F1. L'écurie britannique construit un moteur plus fiable en remplaçant le cadre traditionnel de la voiture par un châssis monocoque en aluminium. Grâce à cette innovation, Jim Clark remporte le titre deux fois en l'espace de trois ans.
L'introduction des ailerons à la fin des années 1960 est inspirée par la Can-Am Chaparral de Jim Hall. Créant une force d'appui qui favorise la traction et la stabilité des voitures sur la route, l’ajout des ailerons marque la fin de l'ère Lotus. Comme les voitures pouvaient atteindre des vitesses plus élevées, aucune autre voiture ne pouvait rivaliser.
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Les années 1970-1980
Les débuts de l’aérodynamisme
Dans les années 1970, la F1 entre dans l'ère de l'aérodynamique. L'équipe Lotus fait son retour sur le devant de la scène en adoptant un nouveau design avec un nez « pelleté » à côté des ailerons. Cette voiture, pilotée par différents pilotes, remporte cinq championnats.
C’est à ce moment-là, en 1975, avec les pilotes Niki Lauda et Clay Regazzoni, que Ferrari émerge. Ces pilotes conduisent une 312T à moteur à 12 cylindres à plat. Environ un an plus tard, des boîtes à air sont introduites derrière les cockpits des voitures de F1, ce qui fait circuler l'air jusqu'au moteur. C'est le début des effets de sol en Formule 1 qui permettent à la voiture de se rapprocher de la piste et d'augmenter la consommation d'énergie.
Les ingénieurs ont continué d’expérimenter différentes conceptions aérodynamiques pour rapprocher la voiture du sol dans le cadre d'un processus appelé « optimisation de l'effet de sol ». Il a fallu quelques essais et erreurs pour y parvenir. Au départ, les voitures étaient trop basses et incapables d'absorber les bosses ou les bordures de la route. L'ajout de tunnels Venturi et d'une carrosserie plus élégante a permis d'améliorer l'adhérence sur la piste et la vitesse dans les virages. Les tunnels Venturi on fait accélérer l'air dans les zones creusées dans le plancher de la voiture, ce qui améliore la downforce (ou force d'appui).
Au début des années 1980, toutes les équipes utilisent une voiture à effet de sol optimisé. Toutefois, ces progrès s'accompagnent d'un risque accru d'accidents. En 1982, les effets de sol sont interdits.
Une percée dans le domaine de la turbocompression
En 1977, Renault crée la toute première F1 turbocompressée, la RS01, pilotée par Jean-Pierre Jabouille. Le turbo lag, un mécanisme qui retarde l'accélération du pilote, était la grande force de ces nouveaux moteurs turbocompressés,. Alors que le moteur mettait du temps à produire des gaz d'échappement, les pilotes pouvaient encore atteindre des vitesses remarquables en appuyant un peu plus fort sur la pédale d'accélérateur.
Le développement des moteurs turbo a été lent, car 11 écuries utilisaient encore des moteurs Cosworth très performants. Mais en 1983, les moteurs turbocompressés ont commencé à s'imposer après que Nelson Piquet, au volant d'un moteur BMW de ce type, ait remporté le championnat du monde. Au même moment, McLaren introduit le moteur TAG-Porsche qui fera un bond en avant la saison suivante. La nouvelle McLaren MP4/2 équipée du turbo TAG remporte 12 des 16 courses de la saison 1984, démontrant ainsi la puissance de ces moteurs.
À la fin des années 1980, les légendes Ayrton Senna et Alain Prost s’affrontent sur la piste. L'un des moments les plus tristement célèbres entre les deux pilotes s'est produit lorsque Senna a dépassé Prost dans le dernier tour du Grand Prix de Monaco, ce qui a donné lieu à des accusations de victoire volée. Les turbocompresseurs ont ensuite été interdits à la fin des années 1980, en raison de leurs poussées de puissance imprévisibles. Après cette interdiction, les turbos ont été remplacés par des moteurs de 3,5 litres à aspiration naturelle.
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Les années 1990-2000
La F1 des années 1990 a été largement marquée par l'essor de l'électronique dans les voitures. La première boîte de vitesses semi-automatique combinée à l'antipatinage de la FW14 est principalement responsable de l'entrée de la F1 dans l'ère numérique. La boîte de vitesses, également appelée transmission, permet au pilote de transférer facilement de l'énergie pour accélérer ou ralentir la voiture.
Malgré cela, Senna a continué de gagner sur la McLaren-Honda MP4/6, la FW14 ne réussissant pas à le rattraper. Plus tard, la FW14B de Nigel Mansell a prouvé que la suspension active pouvait s'adapter à la piste, ce qui en a fait une meilleure option pour les pilotes de F1. Grâce à ces améliorations, la FW14B de Mansell a remporté de nombreux GP.
L’assistance par ordinateur est devenue essentielle dans le processus de conception des F1 modernes, mais cela n'a pas duré longtemps. Au début des années 90, la FIA interdit les suspensions actives et autres mécanismes de réglage automatique des voitures. Désormais mis sur un pied d'égalité sans l'aide des ordinateurs, les règlements révisés de la FIA ont renforcé la rivalité entre les pilotes. Les concepteurs devaient aussi respecter les nouvelles spécifications avant les courses, ce qui obligeait à faire l’impasse sur les essais hivernaux en raison de ce calendrier serré. Ces modifications ont indirectement entraîné plusieurs collisions, les pilotes ayant plus de mal à être pleinement maîtres de leur voiture.
La saison 1997 a été marquée par l'introduction du ravitaillement en carburant. Cette nouveauté a provoqué un certain émoi, certains fans affirmaient que la F1 avait perdu de son aspect compétitif avec moins de dépassements entre pilotes du fait de l'introduction de l'arrêt aux stands.
C’est aussi à cette époque que la Tyrrell Racing Organisation a ajouté des « X-Wings » à sa voiture, la Tyrrell I, en 1997. Ces ailerons controversés, montés sur le pied latéral, n'ont cependant pas réussi à s'imposer en raison de leur apparence peu flatteuse. Ils ont été interdits un an plus tard.
Dans les années 2000, Michael Schumacher devient une légende absolue du sport en remportant pas moins de 5 titres consécutifs avec Ferrari (2000, 2001, 2002, 2003, 2004).
À la fin de la décennie, la technologie continue de mettre son nez dans la conception des voitures de F1. Le système de récupération de l'énergie cinétique (KERS) est introduit en 2009, il permet aux pilotes de convertir l'énergie de freinage en puissance supplémentaire. Des ailerons avant et arrière réglables sont également installés pour améliorer l'aérodynamisme.
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Les années 2010 à aujourd’hui
Yuki Tsunoda au volant de la Visa Cash App RB VCARB 01
© Chris Graythen/Getty Images/Red Bull Content Pool
Aujourd’hui, les innovations techniques et technologiques sont monnaie courante. En 2011, le DRS a été introduit, donnant ainsi aux pilotes une fenêtre de tir pour réaliser des dépassements.
Les turbocompresseurs sont revenus en 2014 sous la forme de moteurs hybrides. Ces moteurs mettent l'accent sur les considérations environnementales en combinant un moteur turbocompressé avec des systèmes de récupération d'énergie (ERS). L'ERS comprend la récupération cinétique (ERS-K) et la récupération de chaleur (ERS-H). Cela rend la F1 plus durable et plus proche de la technologie des voitures de route (même si les véhicules de Formule 1 peuvent produire plus de 1 000 chevaux).
Les dernières technologies ont aussi fait leur entrée dans le monde de la F1. Les ingénieurs impriment désormais en 3D les pièces des voitures et des moteurs afin d'accélérer le processus de recherche et de développement. La réalité augmentée (RA) aide les pilotes à naviguer sur la piste avant une course. L'intelligence artificielle (IA) est également utilisée pour examiner les performances des voitures et apporter des améliorations à l'aérodynamisme.
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Le futur des voitures de F1
En F1, l'ingénierie n'a pas de limite pour repousser les frontières de la performance automobile. Malgré ses performances en demi-teinte, la RB20 de Red Bull en était un parfait exemple avec un changement de vitesse hydraulique et une boîte de vitesses à huit rapports sous le capot. Aujourd'hui, avec la RB21, les ingénieurs se sont attelés à simplifier certains des principes de la voiture de l'année dernière, notamment au niveau du flux d'air.
La FIA a de grands projets pour la F1 en 2026. Les voitures devraient être 30 kg plus légères, avec 300 % de puissance de batterie supplémentaire répartie entre la combustion interne et la puissance électrique. L'introduction du mode manuel et d'une plus grande puissance électrique devrait également permettre de voir plus de dépassements pendant les courses.
D'ici à 2030, la F1 a pour objectif d'atteindre un niveau d'émissions nettes nulles. Pour atteindre cela, les innovations techniques devront être à la pointe du progrès. Heureusement, elle utilise déjà 10 % de biocarburant à base d'éthanol, et son objectif est de faire rouler ses voitures avec 100 % de carburant durable.
Voitures de F1 historiques et progrès
L'évolution des véhicules de sport automobile et des voitures de F1 historiques témoigne de l'ingéniosité humaine et de la recherche incessante de la performance. Des premiers jours de la puissance brute aux machines hybrides de haute technologie, la F1 continue de repousser les limites de ce qu’il est possible de réaliser en sport automobile. Avec les nouvelles technologies qui se profilent à l'horizon, l'avenir promet des avancées encore plus passionnantes, garantissant que les voitures de F1 restent au sommet de la compétition et de la vitesse.