Finn Iles descend la piste de Snowshoe, aux États-Unis, lors de la Coupe du monde de VTT UCI 2021.
© Bartek Wolinski/Red Bull Content Pool
VTT

Comment régler et entretenir les suspensions de son VTT ?

Eléments essentiel d’un VTT, les suspensions et amortisseurs nécessitent une attention toute particulière de la part des riders. Kevin Joly, mécano de Finn Iles, nous explique pourquoi.
Écrit par Vincent Girard
Temps de lecture estimé : 6 minutesPublié le
Que ce soit sur un semi-rigide ou un tout-suspendu, les amortisseurs et suspensions sont des éléments centraux du VTT. Pourtant, "ils sont souvent trop négligés par les propriétaires de vélo" explique Kevin Joly, mécanicien du Canadien Finn Iles. "Ces éléments sont par exemple ceux sur lesquels on travaille le plus un week-end de course. L’objectif est d’arriver à accompagner au maximum le pilote dans sa prise de vitesse en essayant que le vélo ait toujours le même comportement à 30 km/h qu'à 70 km/h."
Kevin Joly officie auprès de Finn Iles depuis de nombreuses années sur le circuit de Coupe du Monde et sait évidemment de quoi il parle, lui qui tient son propre bikeshop en parallèle de son rôle de mécano auprès du pilote du team Specialized Gravity. Voici ses conseils sur les principes de base à savoir pour régler et entretenir ses suspensions.
Le bike Mondraker Summon 2021 de Brook Macdonald

Fourche Fox 40 avec six espaceurs à l'avant et 86-90 PSI

© Bartek Wolinski/@wolisphoto

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Que faire à la réception d’un nouveau vélo ?

Tout vélo neuf que je reçois dans mon atelier, que ce soit d’une marque vendant exclusivement sur Internet ou d’une autre qui passe par un revendeur, est un bike sur lequel on va devoir faire une mise en route. C’est-à-dire lubrifier les suspensions car 95% de celles présentes sur les vélos neufs sont peu ou mal lubrifiées. D’ailleurs, on voit la différence à l’atelier quand on récupère un bike qui a déjà roulé et qui n’a pas eu ce check-up avant sa première sortie. Le vieillissement de la fourche est alors plus prononcé.
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En quoi consiste le réglage du SAG ?

Le SAG (ou l’affaissement en français) est la valeur d’enfoncement en pourcentage du vélo par rapport au poids du pilote. C’est ce qui va permettre le maintien du vélo au sol en fonction du poids du rider. La valeur oscille entre 20 et 30% pour la descente, puis entre 15 et 20% pour l’enduro et enfin entre 10 et 15% pour le cross-country. On parle là d’une fourchette de base conseillée par les constructeurs et ça s’affine ensuite en fonction du niveau d’engagement du pilote, de ses sensations au guidon… D’une manière générale, si on parle d’un(e) pilote d’expérience qui a déjà ses repères, il/elle peut régler sa suspension seul(e). Mais il ne faut pas hésiter à aller le faire auprès d’un professionnel qui aura toujours plus de connaissances et de technicité dans le réglage des suspensions.
Le réglage du SAG est essentiel sur un VTT

Le réglage du SAG est essentiel sur un VTT

© Raida Come Mangi

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Comment régler la compression ?

C’est là aussi un élément à prendre en compte sur les suspensions. Il y a une plage de réglage plus large aujourd’hui qui permet d’avoir un vélo plus confortable ou à l’inverse plus réactif, plus consistant en hydraulique. Je conseille d’ailleurs de mettre de l’hydraulique car, en descente et en enduro, les chocs sont intenses à cause des pistes cassantes et de la vitesse. Dans ces conditions difficiles, la compression va permettre d’absorber tout ça et contenir le vélo le mieux possible. Ce qu’on recherche là, ce sont des suspensions capables d’absorber des chocs à basse ou très haute vitesse.
Finn Iles with with a Specialized Gravity Team helper on the DH course at the 2022 DH World Cup in Mont-Sainte-Anne.

Iles reviews some phone footage of his riding

© Bartek Woliński/@wolisphoto

Je préconise davantage de rouler avec la compression plus proche de la position "fermée" que de la position "ouverte". Si à la base, on part sur un réglage médian, on va partir du milieu de la plage de réglage et jouer du milieu jusqu’à la fin du réglage. En cross-country, on va chercher un feeling différent. On sera plus sur le rendement, à rouler raide en suspensions et jouer sur la pression des pneus pour avoir de la traction sans pour autant perdre en énergie en dégonflant les suspensions.
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Et le rebond ?

Le rebond permet l’équilibre d’un VTT. Il sert à avoir une bonne balance du vélo. Quand on est actif sur le bike, il faut que le rebond soit assez ouvert pour permettre de reprendre le débattement le plus vite possible. Imagines que tu roules dans un escalier. Si tu y vas avec un rebond lent, ça va encore aller sur les trois premières marches, mais ensuite, plus tu vas avancer dans les marches, moins le vélo prendra du débattement et ta machine finira par être complètement en bas à la fin des marches. Le rebond permet donc de reprendre du débattement et d’avoir ainsi plus de confort. Bon évidemment, il faut éviter l’excès inverse où le vélo finit par devenir incontrôlable et t’empêche d’avoir du grip dans les compressions. Dans ce cas, ça peut vite bondir comme une sauterelle (rires).
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Quand régler les suspensions ?

Dès qu’on va rouler, il faut contrôler la pression des pneus et des suspensions. Notamment en enduro et en descente, qui sont des pratiques qui mettent les suspensions à rude épreuve en chauffe et en intensité. Il peut y avoir des dispersions d’air, donc c’est important de contrôler à chaque fois ces données. Si on a l’habitude de rouler sur les trails autour de chez soi et qu’on prévoit une journée en bike park, il va aussi falloir adapter les réglages des suspensions, car on a des fréquences et des vitesses plus rapides en bike park. Le poids embarqué dans les freinages et compressions est forcément plus important quand on roule à 70 km/h plutôt qu’à 30 km/h. C’est donc bien de réadapter ses suspensions.
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Faut-il mettre de l’huile sur les fourreaux ?

Aujourd’hui, les joints sont vraiment bons. Au-delà de mettre de l’huile, ce qui n’est pas forcément nécessaire, il faut surtout que les joints soient propre, sans boue ni terre entre le casting et le plongeur. D’où l’utilité d’ailleurs de rouler avec un garde boue pour éviter que la terre rentre dans la fourche. Pour nettoyer les fourreaux, on peut prendre un silicon shine pour avoir des plongeurs bien propres. Et il faut bannir l’utilisation du WD40 qui rendra les joints poreux.
Le vélo de Manon Carpenter, bichonné par son staff

Le vélo de Manon Carpenter, bichonné par son staff

© Bartek Woliński

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Quand faire l’entretien des suspensions ?

Les constructeurs préconisent de les réviser toutes les 100 ou 125 heures. Si on a affaire à un rider qui fait une trentaine de sorties dans l’été, c’est bien de le faire une fois par an. Ou au moins, que les lubrifications de la cartouche d’air et des plongeurs soient réalisées. Si les suspensions sont bien entretenues, on peut les garder des années sans souci, sauf si l'on veut changer par exemple une cartouche plus récente. Je le dis souvent : une suspension, ça s’entretient, ça ne se répare pas. Evidemment, on peut réparer, mais on part alors sur des tarifs assez onéreux. Autant bien l’entretenir pour éviter ça et la faire durer dans le temps.